Le mot Upanishads signifie “s'assoir aux pieds de...”. Ce nom évoque le position de l'élève qui venait aux pieds du maître pour recevoir son enseignement. Mais pas n'importe quel enseignement... Les Upanishads sont la fine pointe des Védas, le résultat de siècles de réflexion philosophique et d'exploration profonde de la conscience elle-même. Les 11 upanishads majeurs sont le fondement même de l'hindouisme. Et bien qu'ils présentent des mythes, des cosmogonies et des positions philosophiques parfois très différentes, les Upanishads ont en commun l'affirmation suivante: ayam ātmā brahma , c'est à dire, Dieu et le Soi ne font qu'un.
Le Katha Upanishad est peut-être le plus apprécié en Inde et partout ailleurs dans le monde. Il est relativement court et straightforward, riche en concepts, mais surtout il a comme trame de fond l'histoire irrésistible d'un jeune garçon espiègle mais très sage qui arrive à embarasser la Mort elle-même!
Le Katha commence avec un homme riche, Vajasravasa, qui décide de se donner du mérite en accomplissant le sacrifice du don de tous ses biens (principalement des vaches). Mais son jeune fils, Nachiketas, déjà empli de sagesse malgré son jeune âge, voit bien l'hypocrisie de cet acte. Tout d'abord, les vaches sont vieille et ne servaient plus à rien de toute façon, le sacrifice n'est donc pas très grand. Mais surtout, le sacrifice de Vajasrava a pour but d'accumuler du mérite et des faveurs. Alors, futé, l'enfant demande à son père: "À qui vas-tu me sacrifier, moi?" Le père ne répond pas, ne comprend pas. Nachiketas pose la même question trois fois, et le père finit par se mettre en colère et dit: "C'est à Yama, le dieu de la Mort, que je vais te donner!"
Or, ce qui était une boutade due à l'exaspération, Nachiketas la prend au sérieux. Il laisse tout derrière lui se rend donc dans le Royaume des morts. Or, aux portes du palais, personne pour l'acceuillir, pendant trois jour! Mais Nachiketas attend patiemment, sans rien à manger. Le troisième jour, Yama arrive et voit le jeune homme à l'entrée de son Royaume. Il est très embarassé de n'avoir pu accomplir les rites d'hospitalité. Pour se faire pardonner, il offre à Nachiketas de réaliser trois de ses voeux.
Son premier souhait est que son son père ne soit plus en colère contre lui lorsqu'il reviendra chez lui. Yama l'exauce.
Son deuxième souhait est de connaître le secret du sacrifice du Feu. Yama l'exauce et lui enseigne, et décide même que ce sacrifice portera désormais le nom de Nachiketas.
Et voici que est le troisième souhait de Nachiketas.
Nachiketas : « Un doute subsiste sur le sort de l'homme après sa mort : selon les uns, il existe toujours, selon les autres, il n'existe plus. Quant à moi, je ne le saurai qu'après que tu me l'aies enseigné. Voilà, sur les trois vœux, le troisième de mon choix. »
Nachiketas aux pieds de Yama
Yama répliqua : « Sur ce point, le doute a subsisté même chez les dieux, et cela depuis les temps jadis. La nature de l'Atman (le Soi) est d'une telle subtilité, que cela n'est pas facile à comprendre. Demande donc un autre vœu, ô Nachiketas ! N'insiste pas, et épargne-moi d'avoir à tenir un tel engagement ! »
Nachiketas : « Ô Yama, si même les dieux entretiennent toujours des doutes à ce sujet et que Toi, la Mort, tu confirmes qu'il est malaisé à comprendre, je conçois qu'il n'est pas d'enseignant qui puisse t'être supérieur sur un tel sujet ! Et assurément, nul autre vœu ne peut valoir celui-ci. »
Yama : « Demande-moi des fils et petits-fils qui deviendront centenaires. Demande-moi des troupeaux entiers de bétail, des éléphants, des chevaux et de l'or. Demande-moi un vaste domaine sur la terre des humains, où tu vivras autant d'automnes que tu le désireras. S'il est un autre vœu que tu puisses juger égal à celui-ci, demande-le moi : ainsi la richesse et la longévité. Puisses-tu devenir roi, ô Nachiketas, et régner sur un vaste royaume. Je t'accorderai de pouvoir jouir de tout ce que tu pourras désirer! Tous ces désirs qui sont si difficiles à obtenir dans ce monde des mortels, quels qu'ils puissent être, choisis donc parmi eux. Vois ces belles et jeunes nymphes dans leurs chariots, qui jouent du luth – aucun mortel n'a jamais pu en obtenir une. Je te les offre, et elles seront tes douces esclaves. Mais, ô Nachiketas, ne me demande pas de t'éclairer le mystère de la mort ! »
Nachiketas lui répondit : « Tous ces biens, ô Mort, sont éphémères et ne durent que jusqu'au petit matin ! De plus, les plaisirs épuisent la vigueur de tous les sens dans l'homme. Et la vie, même la plus longue, est en vérité bien courte ! Garde donc ces chevaux, ces danses et ces chants, pour Ton propre plaisir.
Les richesses ne procureront jamais le bonheur à l'homme. Qui plus est, puisque je T'ai vu face à face, j'obtiendrai forcément la richesse ; et la durée de ma vie sera de toute façon fixée par Toi. Aussi le seul vœu qui me satisfasse est bel et bien celui que je t'ai demandé. Après avoir eu le privilège d'un séjour chez les impérissables et les immortels, et y avoir appris que ses souhaits les plus ardents pouvaient être satisfaits par eux, quel mortel résidant ici-bas se réjouirait d'une grande longévité, lui qui est devenu conscient du caractère éphémère de la beauté, des plaisirs et des joies ici-bas ? Ô Yama, dévoile-moi ce grand Au-delà, qui est d'une telle obscurité pour les mortels. Moi, Nachiketas, je ne te supplie d'aucune autre faveur que de me faire pénétrer dans le grand mystère de l'Au-delà ! »
Face à une telle sagesse, Yama s'incline. Car Nachiketas a choisi de suivre la Vérité plutôt que la satisfaction éphémère. Il exauce donc le souhait de Nachiketas, en lui enseignant la nature réelle du Soi.
(suite bientôt!)
C'est une réflexion intéressante que tu as, mais ce n'est pas ce que le texte dit. Dans l'hindouisme, quand on parle des dieux au pluriel, on réfère aux dévas, qui sont des créations du Dieu Unique, Brahman, dont le rôle est d'administrer l'univers et de veiller à sa bonne conduite (ex: Indra, Yama, Agni, Varuna, Vayu, etc). Certes, les dévas étaient des divinités très craintes aux début de la religion védique mais au fur et à mesure que l'idée de Brahman s'est imposée, ils ont graduellement régressé vers un statut moins enviable d'êtres plutôt imbus d'eux mêmes et colérique, et presque aussi ignorants que les humains. Seuls Vishnou, Shiva et Brahma ont échappé à ce traitement, car ces trois là en sont venus à être considérés comme des facette de Brahman lui-même.
ReplyDeleteJe pense personnellement qu'aux yeux de Dieu la mort n'a rien de bien différent que n'importe quel changement que peut vivre un être. Son Souffle se retire d'un corps pour entrer dans une multitude d'autres qui naissent, et la vie continue. C'est nous qui accordons une importance dramatique à la mort, car nous avons peu de foi, et nous sommes soumis à notre attachement au corps et à la présence physique de ceux qu'on aime. Mais pour Dieu le corps n'est qu'une expression parmi tant d'autre que la Vie peut prendre.
Quand à ce que le Katha dit à ce sujet, tu le sauras bientôt!